Le rôle du notaire et de l’avocat dans une succession difficile
L’épreuve du deuil n’est pas passé… il est cependant temps de penser à l’organisation du patrimoine du défunt car même si l’héritier n’est pas pressé de percevoir sa quote-part, trop attristé par cette absence, reste que les créanciers (fisc, maison de retraite, edf …) eux, vont se manifester.
Puis, certains héritiers vont exprimer leur souhait d’être informés de la gestion des comptes bancaires, vont s’interroger sur l’existence ou non d’assurances-vie… et puis, que sont devenus les papiers de famille ? les meubles meublants ? les bijoux du défunt ? Que doit-on faire de la maison lui ayant appartenu ? Si l’on ne s’en occupe pas, il va se dégrader. Qui va payer les taxes foncières, l’assurance habitation ? D’où parfois la nécessité de le vendre vite… sauf que l’un des héritiers estime y avoir apporté une amélioration car il y a effectué des travaux et les a même financés lui-même par générosité envers son père ou sa mère qu’il avait voulu aider.
La situation se complique dans les familles recomposées, en présence d’une compagne ou d’un conjoint survivant qui ne serait pas l’ascendant des héritiers du défunt. Celui-ci est souvent soupçonné d’avoir profité des acquêts au détriment des descendants directs du défunt.
Le dossier n’est pas simple lorsque faute de dialogue entre les héritiers, chacun se fait sa propre idée de la succession et nourrit peut-être des fantasmes qui ne pourraient s’estomper qu’en cas de recherche offensive de la vérité.
Puis, le temps passant encore et l’un des héritiers découvre que sa sœur ou son frère s’était vu consentir une procuration par le ou la défunte de son vivant ou que ce défunt avait décidé, peu avant son décès, d’ouvrir un compte bancaire conjoint afin d’y adjoindre le nom de l’un de ses fils ou filles, ou de transformer son compte personnel en compte joint. La situation est redoutable lorsque ce compte n’a pu être alimenté que grâce aux deniers personnels de la défunte. Les héritiers qui n’ont jamais bénéficié de telle faveur peuvent se sentir alors lésés.
Qu’en est-il lorsque le défunt avait acquis avec sa compagne adultère la nue-propriété d’un bien immobilier, tandis que la compagne adultère aurait acquis l’usufruit seulement, puis quelques temps après, lui aurait vendu sa nue-propriété selon acte authentique mentionnant que le prix a été payé « hors la comptabilité du notaire ». La compagne adultère a-t-elle réellement payé le prix ? Ne serait-ce pas une donation déguisée si le défunt avait en réalité assumé le financement de ce prix au lieu et place de l’acquéreur ? Cette donation ne revêt-elle pas les attributs d’un détournement de la réserve héréditaire due aux enfants ?
Force est d’admettre que le premier réflexe d’un héritier diligent sera de saisir le notaire de famille ou un notaire près de chez lui. Celui-ci ouvrira le dossier succession. Cela commence par les vérifications d’état civil sur le défunt et les héritiers de celui-ci. Puis, il tentera de demander aux banques des informations sur les comptes dont les soldes créditeurs ou débiteurs au jour du décès avec clôture des comptes. Puis, il tentera d’établir un projet de déclaration de succession destiné à être notifié au service des impôts pour payer les droits de succession sauf abattement. Puis il établira le projet d’acte de partage et l’état liquidatif.
Mais de la déclaration de succession à l’acte de partage, nombre de tergiversations peuvent se déclencher dès lors que l’un des héritiers serait soupçonné d’avoir bénéficié par exemple de dons manuels qu’il n’aurait pas déclarés au notaire de la succession de sorte qu’ils auraient échappé à l’obligation du rapport.
Dans ce cas, les héritiers refusent de signer les actes, demandent au fisc par l’entremise du notaire une dispense de majorations et pénalités de retard sur les droits de succession qu’ils n’auraient pas encore payés du fait d’une contestation entre eux.
Et là, le notaire ne peut plus faire de miracle… Certes, il aura tout tenté ou presque pour arrondir les angles et rapprocher les parties et ce, dans le plus grand respect de son obligation d’impartialité et d’indépendance.
Mais lorsque s’ajoute à cela, son impossibilité de communiquer une copie d’un testament au motif qu’il serait tenu par le secret professionnel, alors la décision de consulter un avocat expérimenté en droit des successions s’avère assez nécessaire si l’on souhaite donner impulsion à un dossier bloqué.
L’avocat va pouvoir intervenir avec sa casquette de conseil et assurer une assistance juridique aux héritiers désireux d’aller de l’avant. Ce n’est que lorsqu’un différend persiste que l’Avocat ira plus loin en engageant une action en partage judiciaire et en saisissant le Tribunal compétent des questions qui méritent d’être préalablement tranchées par lui. Car le notaire n’est pas un juge et il ne peut pas imposer sa façon d’interpréter un testament. Il ne peut pas toujours dire si l’auteur du testament était sain d’esprit au moment où il a été établi, surtout si c’est un testament olographe (manuscrit sous seing privé).
La voie contentieuse est alors seule de mise et le procès peut durer en moyenne entre une et trois années.
Ronit ANTEBI Avocat en droit des succession à Cannes
Le 16 juin 2017