Un homme marié a souscrit deux contrats d’assurance-vie auprès de la société CNP ASSURANCES et de la compagnie CARDIF ASSURANCES VIE. Par testament authentique de 1997, il a institué son conjoint usufruitier bénéficiaire du capital et ses enfants, nus propriétaires de ce même capital.
Mais en 2006 et 2007, le souscripteur a signé des avenants aux contrats d’assurance-vie en vue de changer les modalités du bénéfice de ces capitaux, en désignant son épouse en pleine propriété et à défaut, ses enfants.
Les compagnies ont donc, à son décès, versé les capitaux d’assurance-vie à son épouse.
L’une des filles a assigné sa mère en contestant la validité des modifications contractuelles par avenants.
Elle a invoqué les dispositions de l’article 1035 du Code civil selon lequel « Les testaments ne pourront être révoqués, en tout ou en partie, que par un testament postérieur ou par un acte devant notaires portant déclaration du changement de volonté ». Elle a explicité que son père aurait dû procéder par voie de révocation testamentaire et non par avenants aux contrats d’assurance-vie.
Certes, il y a un texte qui concerne le droit des assurances, l’article L 132-8 du Code des assurances, qui dispose que la désignation ou la substitution du bénéficiaire peut être réalisée par voie d’avenant au contrat, mais ce texte ne régit que les rapports entre l’assureur et le bénéficiaire. Tandis que l’article 1035 du Code civil prône la révocation d’un testament par un testament postérieur. Or, la règle selon laquelle le texte spécial prime le texte général (specialia generalibus derogant) ne peut s’appliquer car ces deux textes ne sont pas de même nature.
La Cour d’appel a jugé que les avenants contractuels modificatifs étaient valables même si le testateur n’avait pas pris le soin de révoquer ses dispositions testamentaires.
Elle a dit pour droit que la modification de la clause de bénéficiaire d’une assurance-vie pouvait intervenir soit par avenants au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du Code civil, soit par voie testamentaire, sans qu’il soit nécessaire de respecter un parallélisme des formes entre la voie choisie pour la désignation initiale (testament) et celle retenue pour la modification (avenants contractuels).
La Cour de cassation, chambre civile, a rendu un arrêt en date du 3 avril 2019 (pourvoi n° 18-14640, Légifrance) confirmant l’arrêt d’appel et disant par un attendu de principe qu’en application de l’article L 132-8 du Code des assurances, le contractant d’une assurance-vie a le droit de substituer un bénéficiaire à un autre, cette modification pouvant être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du Code civil, soit par voie testamentaire, sans qu’il soit nécessaire de respecter un parallélisme des formes entre la voie choisie pour la désignation initiale et celle retenue pour la modification.
Il ressort de cette jurisprudence de la Cour de cassation que la clause de bénéficiaire d’une assurance-vie peut être modifiée aussi bien par voie testamentaire que contractuelle.
Ronit ANTEBI – Avocat en droit des assurances
Publié le 11 novembre 2019