L’Article L. 321- 13 du code rural dispose que les descendants d’un exploitant agricole qui, âgés de plus de 18 ans, participent directement et effectivement à l’exploitation sans être associés aux bénéfices ni aux pertes, et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d’un contrat de travail à salaire différé.
Le travail sera rémunéré au décès de l’exploitation bénéficiaire et la succession supportera cette charge au passif.
La prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales ne donnera pas lieu au paiement d’une soulte à la charge des héritiers.
Le taux annuel du salaire sera égal, pour chacune des années de participation, à la valeur des deux tiers de la somme correspondant à 2080 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur, soit au jour du partage consécutif au décès de l’exploitant, soit au plus tard à la date du règlement de la créance si ce règlement intervient du vivant de l’exploitant.
Les sommes attribuées à l’héritier de l’exploitant au titre du contrat de travail à salaire différé sont exemptes de l’impôt sur le revenu en application de l’article 81 du code général des impôts.
Il est constant que les descendants de l’exploitant doivent démontrer l’existence de la créance de salaire différé qu’ils s’allèguent.
Ils doivent donc établir leur participation directe et effective à l’exploitation viticole ou agricole, ainsi que l’absence de contrepartie reçue de ce fait.
A pu être déclarée recevable une attestation manuscrite rédigée par l’exploitant agricole, déclarant que ses fils avaient effectué conjointement tous les travaux nécessaires sur ses parcelles de terre et sans aucune rémunération entre 1976 à 1991, année de sa mise en retraite.
Si cette seule attestation ne suffit pas à établir la créance, les héritiers de l’exploitant agricole ont pu produire en outre une correspondance émanant de leur cohéritière aux termes de laquelle cette dernière déclarait être consciente du travail qu’ils avaient exercé dans les terres de leurs parents, ce qui avait permis la conclusion de baux ruraux : « ces 14 ans de travaux gratuits vous ont permis d’acquérir une expérience pratique et juridique afin d’évoluer dans le monde viticole pour votre épanouissement professionnel ».
Ces éléments factuels ont permis de déterminer la participation directe effective de l’exploitant au travail de la terre, sans contrepartie financière.
Il reste à préciser outre la période de travail, le temps consacré dans l’exploitation agricole ou viticole.
Si les créanciers ne parviennent pas à établir qu’ils avaient travaillé à temps complet sur l’exploitation agricole, ils ne pourront prétendre à recevoir un salaire complet différé.
S’ils n’ont participé aux travaux sur l’exploitation du de cujus que les mercredis après-midi et les week-ends ou pendant les congés scolaires, s’ils expliquent qu’ils ont dû effectuer d’autres travaux dans la semaine chez leur employeur, afin de percevoir leurs propres revenus, s’ils ont aidé outre mesure leur tante sur une autre exploitation afin de compléter leurs revenus, s’ils ne se sont consacrés à la terre qu’à l’occasion de leurs permissions de sortie tandis qu’ils accomplissaient par ailleurs leur service militaire, par exemple, les Juges pourront considérer qu’en réalité, les créanciers n’ont accompli qu’un certain nombre d’heures par semaine de travail effectif ce qui correspondrait à quelques semaines de travail par an, et pourront transposer ces heures de travail en pourcentage de salaire différé.
En effet, il est constant qu’une activité partielle sur l’exploitation ouvre droit à une créance de salaire différé, elle-même partielle.
Publié par Me Ronit ANTEBI
Avocate spécialisé en droit des successions au barreau de Grasse