Le dol suppose un acte de déloyauté commis par le cocontractant
Conclure un contrat, c’est avoir la volonté de s’engager. Parfois, le cocontractant a usé d’une tromperie, d’un stratagème ayant pour finalité d’induire l’autre partie en erreur afin de la décider à conclure le contrat à des conditions désavantageuses. Celui qui en est victime ne s’est pas trompé tout seul. En réalité, on l’a sciemment trompé. Le dol suppose un acte de déloyauté commis par le cocontractant. Le dol correspond à des « manoeuvres pratiquées » par l’une des parties. Elles s’apparentent à toutes les machinations, les mises en scène, tous les artifices auxquelles il est recouru pour conduire l’autre partie à contracter.
Par exemple, un garagiste qui rajeunit artificiellement le véhicule d’occasion en trafiquant le compteur kilométrique. Mais la jurisprudence assimile aux manœuvres dolosives, le mensonge et la réticence dolosive. Le mensonge peut résulter d’un document écrit ou avoir été verbalement exprimé. Ainsi, le banquier amène une caution à s’engager en lui certifiant la bonne santé financière du débiteur principal.
Toutefois, le fait de vanter de manière exagérée ses produits n’est pas sanctionné civilement ; les Romains disaient qu’il s’agissait là d’un bonus dolus (bon dol), par opposition au malus dolus (mauvais dol). En effet, tout un chacun doit s’informer et ne pas faire montre d’une trop grande naïveté. Mais la jurisprudence et le législateur ont tendance à sanctionner de plus en plus le mensonge. Par exemple, l’article L 121-1 du Code de la consommation (loi du 27 décembre 1973) réprime la publicité mensongère. La réticence dolosive, c’est le fait de taire une information sur le produit ou le service proposé tandis que si le contractant en avait eu connaissance, il n’aurait certainement pas conclu, ou il aurait conclu mais à des conditions moins désavantageuses.
La jurisprudence met à la charge du contractant une obligation précontractuelle de renseignement. Certaines dispositions imposent que certains contrats doivent comporter des clauses expressément stipulées, à défaut desquelles le contrat est nul (ex : contrat d’assurance, contrat de construction de maison individuelle …). Les risques de réticence dolosive sont alors amoindris voire anéantis. Le dol n’entraîne l’annulation du contrat que dans le cas où le contractant s’est tu, dans le seul dessein d’induire son contractant en erreur. S’il a omis de délivrer une information parce qu’il l’ignorait lui-même, le contrat n’est pas annulable. Lorsque le contractant réticent est un professionnel, la jurisprudence présume qu’il ne pouvait ignorer l’information omise. Le dol n’est retenu comme vice du consentement que s’il émane d’une partie contractante (article 1116 du Code civil). S’il provient d’un tiers au contrat, il donnera lieu à des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
Par exception, le dol peut émaner d’un complice du cocontractant ou d’un tiers en matière de libéralité, d’acte unilatéral. L’erreur est indifférente : elle peut porter sur la substance de la chose, sur la valeur de la chose, sur la personne du cocontractant… Néanmoins, en pratique, la consécration de la réticence dolosive se heurte à plusieurs obstacles. La preuve que le vendeur connaissait les qualités intrinsèques de la chose au jour de la vente n’est pas aisée à rapporter. C’est là que l’avocat doit intervenir pour aider son client à se préconstituer cette preuve. L’article 1116 du Code civil dispose que « le dol ne se présume pas et doit être prouvé ». Le dol est un fait juridique qui se prouve par tous moyens (attestations de témoins, photographies, échanges de courrier, pages web …). La charge de la preuve incombe à celui qui demande l’annulation du contrat. Il est difficile de reprocher au vendeur une réticence lorsque celui-ci n’ignore pas l’authenticité d’une œuvre d’art mais ignore la valeur que le marché lui destine.
Enfin, il faut que l’information cachée ait été déterminante du consentement du contractant trompé. Car si elle n’est qu’accessoire, il n’y a pas de dol. Si le dol est incident, la partie informée aurait quand même contracté mais à un prix inférieur, une partie de la doctrine estime qu’il est possible de solliciter non pas l’annulation du contrat mais l’attribution de dommages et intérêts. En vertu de l’article 1304 du Code civil, le dol vicie le consentement et la sanction encourue est la nullité du contrat. Cette nullité est relative et l’action en nullité se prescrit par cinq ans. Mais le dol est aussi une faute qui peut être sanctionnée par l’allocation de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle (article 1382 du Code civil). Il s’agit d’effacer le dommage et de faire comme si le contrat n’avait jamais été conclu.
Lorsque la victime fait le choix de ne pas demander la nullité du contrat, et demande des dommages et intérêts, son préjudice réparable consiste dans la perte d’une chance d’avoir pu contracter à des conditions plus avantageuses. Si le dol émane d’un tiers, la seule sanction concevable est celle consistant dans l’allocation de dommages et intérêts.