Assurance-vie alimentée par les deniers communs des époux : un bien propre au conjoint survivant bénéficiaire
La Cour de cassation, première Chambre civile, a rendu un arrêt de rejet en date du 25 mai 2016, 15-14.737, Publié au bulletin, qui fait jurisprudence.
En effet, la cour d’appel de Dijon avait rendu une décision en date du 15 janvier 2015 que la cour de cassation a cru bon devoir valider.
En l’espèce, Pierre avait souscrit deux contrats d’assurance sur la vie et désigné son épouse commune en biens, Geneviève, comme seule bénéficiaire.
Il est décédé le 24 juillet 2004, laissant pour lui succéder cette dernière et ses six enfants et cinq petits-enfants venant par représentation.
Sa fille et trois de ses petits-enfants, ont assigné leurs cohéritiers en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession paternelle.
Geneviève décède en cours d’instance, le 25 mai 2013.
Les parties ont sollicité l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de sa succession.
Elles demandaient qu’il soit statué sur le sort du capital garanti dont leur mère était bénéficiaire avant de décéder.
Ils soutenaient que les capitaux versés à Geneviève en exécution des contrats d’assurance sur la vie sont réintégrés à l’actif de la communauté ayant existé entre Pierre et Geneviève.
Ils prétendaient que le capital d’une assurance-vie, alimentée par des deniers communs du couple, mariés sous le régime de la communauté, tombait en communauté.
Ils développaient l’idée que selon l’article L 132-13 du Code des assurances, ni les capitaux d’assurance-vie ni les primes versées ne sont soumis aux règles du droit des successions.
Bien propre au conjoint bénéficiaire
Selon la Cour de cassation,
« Mais attendu qu’il résulte de l’article L. 132-16 du code des assurances que le bénéfice de l’assurance sur la vie contractée par un époux commun en biens en faveur de son conjoint constitue un propre pour celui-ci, peu important que les primes aient été payées par la communauté ; que, par ce motif de pur droit substitué, … l’arrêt se trouve légalement justifié ».
Cette jurisprudence est intéressante dès lors qu’elle répond à certains arguments que l’on peut rencontrer en pratique selon lesquels une assurance-vie alimentée à l’aide des deniers communs et ayant profité au conjoint survivant, serait un bien commun qui devrait être réintégré dans la communauté de sorte que le conjoint bénéficiaire serait supposé transmettre en réalité la moitié de ce capital. La solution est contraire à ce que l’on aurait pu penser dès lors que le bénéfice de telle assurance-vie est en réalité qualifié de bien propre au conjoint survivant bénéficiaire et sera intégralement réintégré dans la succession de ce dernier même s’il avait été commun en biens avec le souscripteur.
Publié le 27 octobre 2021
Me Ronit ANTEBI Avocate en droit des successions sur la Côte d’Azur