Arrêt de la première chambre civile de la cour de cassation du 7 décembre 2016 (JURIS Data n°2016-026092)
Un couple s’était marié sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts puis avait changé le régime matrimonial avec clause d’attribution intégrale des biens de la communauté au dernier survivant.
Le mari est décédé en 2007.
Il laissait pour lui succéder trois enfants issus d’une précédente union, outre son conjoint survivant.
Les enfants ont assigné la conjointe aux fins d’annulation du changement de régime matrimonial et en partage judiciaire de la succession de leur père.
Les juges ont cependant rendu un jugement ayant rejeté l’action engagée.
Les consorts ont donc réassigné la conjointe survivante dans le cadre d’une action en retranchement et aux fins de partage judiciaire.
La conjointe survivante avait soutenu que l’action était irrecevable car les enfants l’avaient déjà assignée en partage judiciaire et qu’ils auraient dû à cette occasion, solliciter une indemnité de retranchement. Elle invoque le principe de la concentration des moyens et celui de l’autorité de la chose jugée.
La Cour de cassation a dit que s’il incombe au demandeur de présenter à l’instance l’ensemble des moyens, il n’est pas tenu de formuler dans la même instance toutes les prétentions fondées sur les mêmes faits.
Il est donc possible d’agir dans une première instance en annulation de la convention matrimoniale puis d’engager une seconde instance, pour solliciter une indemnité de retranchement.
La Cour de cassation rejette le pourvoi sur ce point.
Mais un second moyen avait été soutenu, selon lequel le partage ne peut être demandé que si les parties sont en indivision successorale. La cour de cassation a estimé qu’en ordonnant le partage judiciaire, les juges du fond ont violé l’article 840 du code civil puisque les enfants issus du premier lit ne pouvaient pas revendiquer de droits indivis avec la conjointe survivante ; leur action n’avait vocation qu’à recueillir une indemnité de retranchement ayant pour objet de rétablir les héritiers réservataires dans leurs droits par suite d’un avantage excessif consenti au conjoint survivant.
Tels sont les enseignements que l’on peut retenir de cet arrêt de la cour de cassation ce d’autant qu’en cas d’insolvabilité du conjoint survivant, la réduction de l’avantage matrimonial peut s’exercer en nature au profit des enfants de sorte que dans cette hypothèse, les bénéficiaires du retranchement peuvent se trouver en indivision avec le conjoint survivant. Cette situation doit cependant être établie au jour de la double action en retranchement et en partage.
En l’occurrence, la Cour de cassation a jugé que les héritiers réservataires étaient simplement créanciers de l’indemnité de retranchement d’un avantage matrimonial excessif (en argent).
Ronit ANTEBI Avocat Cannes