Le décès cristallise l’ouverture de la succession.
Pour les successions importantes, l’héritier le plus diligent va choisir un notaire lequel va se rapprocher des cohéritiers, leur demander les éléments d’état civil, interroger les banques du défunt, dresser l’actif et le passif, organiser éventuellement un inventaire mobilier, établir la déclaration de succession puis viendra le moment de la signature de l’état liquidatif et le partage entre les héritiers.
Le partage peut intervenir amiablement si les héritiers sont d’accord.
Il peut intervenir judiciairement si le Tribunal judiciaire est saisi à la diligence d’un ou de plusieurs héritiers.
Lorsque le partage intervient, il clôt le dossier de succession.
Toute action sera prescrite cinq ans après l’ouverture de la succession et deux ans après le partage clôturé.
Il peut arriver qu’après le partage effectué, un héritier découvre qu’un cohéritier a abusé de la procuration bancaire du défunt. Il souhaite lui demander de rapporter les dons manuels et il agit dans le cadre d’une action en recel successoral pour dissimulation de valeurs en argent rompant l’équité entre les cohéritiers.
Dans un arrêt du 6 novembre 2019, pourvoi n° 18-24332, Légifrance, la première chambre civile de la cour de cassation a rejeté le pourvoi en cassation qui avait été intenté à la diligence du fils des défunts contre sa sœur.
Le frère avait découvert que sa soeur avait utilisé sa procuration sur les comptes bancaires de ses parents à son profit personnel.
Il l’a assignée en demandant le rapport des sommes ainsi prélevées et l’application des peines du recel sur celles-ci, le rapport de la libéralité constituée par la mise à disposition à titre gratuit d’un appartement lui appartenant, et l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre leurs parents et de leurs successions.
La Cour d’appel avait déclaré toutes ses demandes irrecevables car un partage amiable était déjà intervenu.
Le frère avait soutenu devant la Cour de cassation que le partage peut être partiel, qu’en conséquence, le partage amiable et informel des biens existant à l’ouverture de la succession n’est pas en soi de nature à priver un héritier du droit d’agir ultérieurement en ouverture des opérations de compte-liquidation et partage complémentaire des valeurs soumises à rapport ou à réduction.
Il ajoutait que la demande tendant à voir condamner un héritier au titre du recel successoral pour avoir dissimulé une donation rapportable est recevable indépendamment de l’action en partage judiciaire.
La Cour de cassation a jugé ainsi :
« Mais attendu que les demandes en rapport d’une libéralité dont aurait bénéficié un héritier et en application de la sanction du recel successoral ne peuvent être formées qu’à l’occasion d’une action en partage judiciaire ; qu’une telle action ne peut plus être engagée lorsque les parties, ayant déjà procédé au partage amiable de la succession, ne sont plus en indivision ».
Et attendu qu’après avoir relevé que les parties avaient procédé au partage amiable des immeubles, des meubles et des liquidités dépendant des successions des parents, la cour d’appel en a déduit à bon droit que les demandes du frère n’étaient pas recevables.
La Cour de cassation sous-entend que le frère n’avait ni engagé une action en nullité de ce partage ni agi en complément de part ou en partage complémentaire.
Cela laisse entendre qu’une action en rectification du partage effectué, en nullité, en complément de part, peut être intentée après que le partage ait été opéré.
Mais encore faut-il que les conditions prescrites par les dispositions des articles 884 et suivants du Code civil soient réunies (vice du consentement de l’héritier, omission d’un héritier, lésion de plus d’un quart) et encore faut-il respecter le double délai de prescription des articles 2224 du Code civil (5 ans) et 889 (2 ans à compter du partage clôturé).
Il ne sera cependant pas possible d’agir en partage judiciaire après qu’un partage amiable soit intervenu. Il est pourtant possible de demander la rectification du partage déjà intervenu mais aux conditions strictes posées par les articles 884 et suivants du Code civil et dans le respect de la double prescription spécifique de deux ans à compter du partage en cas de lésion et cinq ans à compter du décès.
Ronit ANTEBI Avocat en droit des successions à Cannes
Publié le 6 janvier 2020