La cour de cassation première chambre civile a rendu un arrêt le douze septembre deux mille douze (cf. Légifrance pourvoi n° 11-15006).
Cet arrêt est intéressant car il illustre un cas de recel successoral par le biais des virements et des procurations bancaires et il met en oeuvre la fameuse double sanction de l’article 778 du code civil.
En l’espèce, une veuve avait laissé trois enfants pour lui succéder.
La fille était titulaire avec sa mère de deux comptes joints.
Elle avait reçu une procuration générale sur les comptes de sa mère.
Sa mère était placée sous tutelle par jugement de décembre 2001.
Elle décède le 30 octobre 2002.
Le fils saisissait le Tribunal Judiciaire de Nancy pour demander l’ouverture du partage judiciaire, et la condamnation de la sœur à rapporter à la succession les sommes qu’elle avait retirées sans justification des comptes du vivant de leur mère.
La sœur avait soutenu qu’elle avait rendu des services à sa mère qui dépassaient ceux habituellement attendus d’une maison de retraite, qu’elle l’avait accompagnée en taxi pour ses déplacements et ses vacances, qu’elle avait pris en charge ses dépenses vestimentaires, le coiffeur, ses soins médicaux, ses loisirs…
Elle ajoutait que ses frères ne prouvaient pas qu’elle avait eu l’intention frauduleuse de receler les sommes d’argent débitées sur les comptes de sa mère, car la mesure d’expertise qui avait établi l’utilisation des procurations bancaires pour effectuer des opérations bancaires dans son intérêt exclusif, ne précisait pas les circonstances propres à caractériser cette prétendue intention frauduleuse de rompre l’égalité du partage.
La Cour d’appel avait condamné la sœur à rapporter là la succession la somme de 77300 euros.
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre cet arrêt en considérant que c’est à juste titre qu’il a dit pour droit que les ressources de la mère se sont élevées à la somme de 287000 euros pour la période considérée et que ses besoins se sont élevés à 215000 euros en raison d’une perte accrue d’autonomie, que si la fille a évité le recours à un établissement pour personnes âgées, que si ses services ont excédé la piété filiale et justifiaient une indemnisation, les juges du fond avaient correctement jugé que la mère ne justifiait pas devoir engager une dépense de 3000 francs mensuels.
Un expert, dont la désignation avait été demandée en justice par le frère, avait en outre comptabilisé les dépenses non justifiées pour la période postérieure à l’ouverture de la tutelle, que la Cour a estimées à 5500 euros.
La Cour de cassation a donc jugé en ces termes :
« Mais attendu, qu’en retenant, dans l’exercice de son pouvoir souverain, la fille avait disposé de ces sommes à l’insu de ses cohéritiers, ce qui lui avait été rendu possible par les procurations dont elle avait été titulaire sur les comptes, les juges du fond ont estimé, sans dénaturer les termes de l’expertise, que le recel d’effets de la succession se trouvait ainsi constitué, de sorte que la fille ne pouvait prétendre à aucune part sur ce montant. »
Au vu de cette jurisprudence, l’héritier qui s’estime victime d’une recel successoral par le truchement de procurations bancaires concédées à l’un des cohéritiers, du vivant de la défunte, ayant profité et servi l’intérêt exclusif du titulaire, peut saisir un Avocat pour constituer un dossier et saisir le Tribunal compétent.