Il ressort des textes et de la jurisprudence que les parties s’engagent lorsqu’elles signent un contrat.
Dans un compromis de vente, le vendeur vend le bien immobilier au prix convenu et l’acquéreur va payer le prix le plus souvent à l’aide d’un emprunt immobilier.
Une conditions suspensive liée à l’obtention du prêt est insérée dans le compromis. Il est indiqué que l’acquéreur va souscrire un prêt immobilier aux conditions et caractéristiques précisées (durée du remboursement, taux d’intérêt, échéance mensuelle).
Mais en pratique des acquéreurs peuvent omettre de stipuler dans le compromis qu’ils vont devoir recourir à une assurance de prêt. Ils ne se posent pas de question sur les primes que cela peut coûter.
La pratique professionnelle de l’Avocat le met en face d’une situation dans laquelle l’acquéreur se rend compte après avoir prospecté les banques qu’il va devoir être confronté à un problème d’assurance. Par exemple, il ignorait que malgré son jeune âge et son bon état général de santé, l’assureur sollicité lui oppose un facteur de risque (obésité) pouvant provoquer la survenance de maladies cardiovasculaires. Dans d’autres situations l’acquéreur avait une pathologie grave quelques années auparavant mais il en a été traité. Les compagnies d’assurances sollicitées vont mettre en œuvre la convention AERAS et examiner le dossier de demande de souscription d’assurance en niveau 1 voire en niveau 2, ou en niveau 3. Si le dossier est refusé en niveau 1, il peut être accepté en niveau 2 mais selon l’application d’une surprime qui peut être conséquente. En niveau 3, la surprime sera autrement plus importante.
Cette hypothèse n’est pas anodine. L’application d’une surprime d’assurance peut bouleverser les prévisions contractuelles de l’acquéreur. Certaines surprimes peuvent aller jusqu’à représenter l’équivalent de l’échéance mensuelle du prêt. Cette n’était cependant pas prévue à l’avance dans le compromis.
Ce, d’autant que dans un arrêt de la Cour de cassation du 23 juin 2010 (Pourvoi n° 09-15963, Légifrance), il a été jugé que l’obtention d’une offre de prêt acceptée, même assortie d’une réserve liée à l’octroi de l’assurance, suffit à considérer la condition suspensive comme réalisée. Elle a rejeté le pourvoi intenté par le vendeur qui avait loué le bien immobilier à tiers, alors que les acquéreurs avaient justifié de l’octroi d’un prêt dans le délai contractuel, le vendeur soutenant pour sa défense que cette offre n’était pas ferme car sous réserve de la souscription d’une assurance qui n’avait pas encore été contractée par l’emprunteur à l’expiration du délai contractuel.
Si cette jurisprudence est bien établie, reste que la convention AERAS est assez récente (2016 et améliorée en 2019) en tout cas, plus récente que l’arrêt de la Cour de cassation précité (ainsi que d’un arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 6 juillet 2015, Légifrance, pourvoi n°14/03914) et qu’elle peut modifier la donne jurisprudentielle car l’acquéreur affecté d’une pathologie ancienne, soignée, peut désormais souscrire un prêt immobilier dans de meilleures conditions, sauf à ce que l’assurance de prêt lui exige une surprime pouvant être assez conséquente. Si cette surprime a pour conséquence de bouleverser l’économie du contrat et d’exposer l’acquéreur à un défaut de remboursement voire à un risque de surendettement, je pense qu’il est possible de plaider cette circonstance liée à l’impossibilité d’honorer le compromis, la condition suspensive pouvant être réputée non réalisée pour motif de santé.
Mais en pratique, il reste plus sécuritaire, d’insérer une clause dans le compromis de vente, valant condition suspensive qui détaille bien les caractéristiques du prêt et de l’assurance, en prévoyant une charge mensuelle, assurance comprise, que l’acquéreur ne souhaite pas dépasser en toutes circonstances.
Ronit ANTEBI Avocat spécialiste en droit immobilier sur la Côte d’Azur
Publié le 16 septembre 2019