Les rédacteurs du Code civil ont imaginé le contrat comme devant être naturellement conclu entre deux « bons pères de famille » également prudents et diligents. La réalité de la vie économique a montré qu’il n’en était pas toujours ainsi.
Les contrats d’adhésion se multiplient ; ils contiennent des stipulations souvent imposées d’emblée à la partie économiquement plus faible.
L’exemple des contrats d’abonnement de téléphonie mobile est criant.
Le risque est d’y voir figurer des clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité du professionnel au détriment du particulier, de voir appliquer des pénalités de retard au particulier et de les voir exclues à l‘égard du particulier…
Déjà, la jurisprudence avait, dans un premier temps, refusé de faire application de clauses exonérant le professionnel de sa responsabilité en cas de dol, de faute intentionnelle, ou de faute lourde.
Sous l’influence des associations de défense des consommateurs, la loi du 10 janvier 1978 a été adoptée mais n’a pas atteint ses objectifs premiers (de donner le pouvoir au juge de qualifier chaque clause déférée comme abusive et de la déclarer d’emblée nulle).
Mais elle consacre tout de même une avancée en conférant au pouvoir réglementaire le soin de dire quelles clauses sont abusives et en créant une Commission des clauses abusives habilitée à prendre des recommandations et à dresser la liste, par type de contrats, des clauses abusives.
Tandis que le pouvoir réglementaire a finalement très peu règlementé – un seul décret a été pris le 24 mars 1978 – la CCA a quant à elle, parfaitement rempli son rôle en édictant pas moins d’une cinquantaine de recommandations.
Une directive communautaire adoptée par le conseil des communautés européennes le 5 avril 1993 et transposée en droit interne en 1995, définit la clause abusive comme celle n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle créée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat.
Transposée en droit interne, cette définition a inspiré celle consacrée par le droit interne et l’article L 132-1 du Code de la consommation en prévoit plusieurs types et reproduit la même liste des clauses abusives que celles qui figuraient en annexe à la directive de 1993.
Les clauses abusives visent les contrats entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs.
A partir de 1994, la jurisprudence a restreint la notion de « non-professionnel » aux personnes dont l’activité n’avait pas de rapport direct l’objet du contrat concerné.
Cette distinction entre les contrats ayant un rapport direct avec l’activité professionnelle s’avère très délicate.
Ainsi un contrat de location de téléphone peut être considéré comme ayant un rapport direct avec l’activité professionnelle d’un commerçant alors qu’un contrat de location de photocopieur peut être jugé sans rapport direct avec l’activité d’une association.
Pour autant, les juges veillent à ce que soit respecté l’esprit du législateur : rétablir un certain équilibre entre les parties en déclarant la clause jugée abusive, nulle et non-avenue.
Il n’est pas certain que la pratique des clauses abusives insérées dans les contrats ait été éradiquée à ce jour.
Mais même agréées, ces clauses peuvent être contestées devant le juge et il peut en être sollicité la nullité lorsque le professionnel en requiert l’application. Car par définition, ces clauses procèdent d’un abus de puissance économique que le particulier ne peut juguler par le biais de la négociation sans se voir refuser le bénéfice de la prestation dont il peut néanmoins avoir besoin.