L’indemnisation des victimes de risques sanitaires
L’article 16-3 alinéa 1er du Code civil dispose qu’ « il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne ».
Une erreur commise par un laboratoire d’analyses médicales relativement à la détection d’une rubéole chez une femme enceinte et une négligence d’un médecin ne faisant pas procéder à une vérification des résultats incertains, laissent une femme dans l’incertitude de sorte qu’elle poursuit sa grossesse à son terme. L’enfant naît gravement handicapé. Les parents intentent une action en responsabilité et la Cour d’appel de Paris, par arrêt du 7 décembre 1993, leur accorde gain de cause en considérant que leur préjudice personnel est indemnisable. Mais les parents entendent obtenir également l’indemnisation du préjudice de leur enfant. En quoi pourrait consister le préjudice de l’enfant ? La Cour d’appel de Paris dit pour droit que « le fait de devoir supporter les conséquences de la rubéole, faute pour la mère d’avoir décidé une interruption volontaire de grossesse, ne peut, à lui seul, constituer pur l’enfant un préjudice réparable ». La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel e jugeant que « les fautes commises étaient génératrices du dommage subi par l’enfant du fait de la rubéole de sa mère ». L’affaire fut renvoyée devant la Cour d’appel d’Angers qui refusa de se ranger du côté de la Cour de cassation. L’Assemblée plénière de la Cour de cassation s’est donc réunie et dans son célèbre arrêt Perruche, a décidé que « dès lors que les fautes commises par le médecin et le laboratoire dans l’exécution des contrats formés avec Madame X… avaient empêché celle-ci d’exercer son choix d’interrompre sa grossesse afin d’éviter la naissance d’un enfant atteint d’un handicap, ce dernier peut demander réparation du préjudice résultant de ce handicap ». La naissance de l’enfant a été considérée comme constitutive du dommage. Cette jurisprudence a provoqué un malaise car elle sous-entend que la naissance peut constituer un préjudice ; or le dommage de vie n’existe pas en droit français car il constitue une atteinte à la dignité humaine.
Il a fallu que le législateur légifère et la loi du 4 mars 2002 a eu recours au concept de la solidarité envers les personnes handicapées (article 1er : « Toute personne handicapée a droit, quelle que soit la cause de sa déficience, à la solidarité de l’ensemble de la collectivité nationale »).
Selon cette loi,
« Nul ne peut se prévaloir d’un préjudice du seul fait de sa naissance ».
« La personne née avec un handicap dû à une faute médicale peut obtenir la réparation de son préjudice lorsque l’acte fautif a provoqué directement le handicap ou l’a aggravé, ou n’a pas permis de prendre les mesures susceptibles de l’atténuer » (article L 114-5, CASF).
Lorsque la responsabilité d’un professionnel ou d’un établissement de santé est engagée vis-à-vis des parents d’un enfant né handicapé, avec un handicap non décelé pendant la grossesse, à la suite d’une faute caractérisée, les parents peuvent demander une indemnité au titre de leur seul préjudice. Ce préjudice ne saurait inclure, les charges particulières découlant, tout au long de la vie de l’enfant, de ce handicap. La compensation de ce dernier relève de la solidarité nationale ».
Ce texte a été considéré comme injuste par la doctrine, qui appelle à des améliorations en faveur de parents dont les devoirs à l’égard de l’enfant ont été occultés par le législateur.
D’autres risques sanitaires à déceler : transfusion sanguine, vaccination, infection nosocomiale, risque technologique…
Un Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a une vocation générale.
En vertu de la loi du 29 juillet 2011 suite au risque encouru par le Médiator, « Lorsque la responsabilité d’un établissement, service ou organise de santé ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à réparation des préjudices du patient et en cas de décès de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour la patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme l’évolution prévisible de celle-ci et présentent un caractère de gravité … » (article L 1142-1 CSP).