Les donations déguisées en droit des successions
La règle en droit fiscal est qu’une donation doit donner lieu à paiement de droits de mutation.
La règle en droit des successions est que toute donation est présumée rapportable sauf clause contraire.
De même, les donations sont réductibles lorsqu’elles excèdent la quotité disponible et les héritiers réservataire peuvent demander une indemnité de réduction à leur bénéficiaire.
Mais en pratique les Français sont ingénieux et parviennent à confectionner des situations non ostensibles soit pour échapper à la fiscalité soit pour éviter d’avoir à rapporter à la succession la donation qui leur aurait été consentie par un parent.
En pratique, on rencontre de nombreuses illustrations de ce à quoi peut ressembler une donation déguisée.
Les illustrations d’une donation déguisée
L’acte fictif
La donation peut ainsi revêtir les habits d’un acte fictif destiné à en occulter un autre. Par exemple, le père de deux enfants, divorcé de leur mère, a rencontré une compagne. Il achète avec elle un bien immobilier. Il souhaite la gratifier à moindre frais. Celle-ci apparaît sur l’acte notarié comme nue-propriétaire tandis que le père des enfants et co-acquéreur, achète l’usufruit. A son décès, la compagne récupère l’usufruit et devient propriétaire en pleine propriété dudit bien immobilier qui échappe ainsi à la succession. S’ils parviennent à établir qu’en réalité, la compagne de leur père n’a jamais payé le prix de l’usufruit, que ce prix avait été payé par leur père sur ses deniers personnels, et que la compagne ne l’avait jamais remboursé de cette prétendue avance de trésorerie, les Tribunaux peuvent requalifier la transaction qui avait l’apparence d’un acte à titre onéreux en donation sujette à réduction en cas de dépassement de la quotité disponible.
L’assurance-vie
Autre cas de figure, une assurance-vie a pu avoir été souscrite par un parent qui se savait atteint d’une maladie ne lui laissant aucune espérance-vie, aucune perspective de racheter le fruit de ses économies, au profit d’un enfant et au détriment des autres. La jurisprudence a pu requalifier ladite transaction en donation déguisée assujettie à des droits fiscaux et au rapport successoral.
Le viager consenti
On voit également des donations déguisées qui prennent la forme de viager consenti au profit d’un enfant en contrepartie d’une rente ou d’un bouquet, totalement sous-estimés par rapport à la valeur immobilière du marché. Cette opération peut être requalifiée en donation déguisée rapportable. Encore faut-il prouver l’animus donandi par tout moyen. Le donateur devait avoir exprimé sa volonté d’aliéner à titre gratuit.
Le compte bancaire conjoint
Une donation déguisée peut être constituée par l’ouverture d’un compte bancaire conjoint, au nom du défunt et d’un enfant que l’on souhaite favoriser au détriment des autres, tandis que ce compte n’aurait été alimenté qu’avec les deniers et les avoirs personnels du parent cotitulaire dudit compte. Reste à établir l’origine des deniers. Cette preuve incombera aux cohéritiers demandeurs au rapport successoral ou au recel successoral.
Cession de parts sociales
Une donation déguisée peut également ressortir d’une cession de parts sociales d’une SCI ou d’une société commerciale, tandis que les parts cédées auraient été sous-évaluées.
Les Français ne manquent pas d’imagination en matière de donation déguisée…
Les tribunaux rectifient au cas par cas les abus de droit mais encore faut-il que les cohéritiers qui s’estiment lésés prennent l’initiative d’engager la procédure judiciaire.
Maître Antebi répond à vos questions en droit des successions
Le cabinet de Maître Ronit ANTEBI Avocat traite de nombreux dossiers en droit des successions dans toute la France et particulièrement dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Cette discipline du droit s’exerce le plus souvent à l’ouverture de la succession c’est-à-dire au jour du décès.